Déclaration de Filippo Grandi, Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés.
L’année dernière, à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la discrimination raciale, j’ai appelé à l’introspection comme moyen de réexaminer les préjugés, les privilèges et notre vision du monde. Tout au long de l’année écoulée, je me suis davantage engagé pour un effectif plus diversifié et inclusif de l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés. Cela constitue l’une des nombreuses actions à entreprendre pour que le HCR soit véritablement une organisation sans racisme.
Nous, au HCR, œuvrons collectivement pour éliminer les freins à la réalisation d’objectifs professionnels ou personnels, tant au sein de nos équipes que pour les réfugiés, les personnes déplacées et les apatrides. Nous reconnaissons qu’il reste encore beaucoup à faire. Chaque jour, mes collègues du HCR et moi-même sommes confrontés à de nouveaux défis – et à de nouvelles opportunités – pour mettre en œuvre nos engagements : dans nos foyers, au travail, dans nos pays et dans le monde entier.
Même si cela est inconfortable, nous nous devons de reconnaître que si notre organisation a pour vocation de protéger les droits humains des personnes contraintes de fuir, certains d’entre nous ont été victimes d’exclusion et de discrimination. Nous devons tenter de surmonter cette contradiction interne alors que nous sommes témoins de déséquilibres similaires dans le monde.
La guerre en Ukraine et la crise humanitaire dévastatrice qu’elle a provoquée présentent également des défis et des opportunités pour un engagement et une vigilance continus dans la lutte contre le racisme et la discrimination.
Au cours des quatre dernières semaines, le monde a suivi les événements avec stupéfaction. D’innombrables vies ont été perdues tandis que des millions d’autres ont été complètement bouleversées. Plus de trois millions de personnes ont été contraintes de fuir leur pays, devenant ainsi des réfugiés, et on estime à plus de six millions le nombre de personnes déplacées à l’intérieur du pays.
Comme pour contrebalancer ce désespoir, nous avons également été témoins de remarquables actes d’accueil et de compassion de la part des pays voisins, notamment des acteurs locaux, qui ont ouvert leur cœur et leur foyer aux Ukrainiens. Cette vague de soutien nous a rappelé notre humanité commune et le pouvoir de la solidarité. Et alors que mes collègues du HCR et moi-même voyons chaque jour comment les communautés et les familles d’accueil du monde entier manifestent cette solidarité, nous devons veiller à ce que le partage des responsabilités au niveau mondial soit renforcé pour tous les réfugiés, d’où qu’ils viennent.
Si des millions de personnes dans le monde ont été émues à juste titre par l’extrême détresse du peuple ukrainien, les mêmes épreuves – la même douleur et le même chagrin, les mêmes pertes et l’angoisse, le même soulagement d’avoir trouvé la sécurité et la même inquiétude face à un avenir incertain – sont vécues par des réfugiés dans le monde entier qui méritent également notre compassion, notre empathie et notre soutien.
Et bien que je sois touché par l’immense soutien dont nous avons été témoins de la part des pays et des communautés d’accueil, nous avons également été témoins de l’horrible réalité selon laquelle certaines personnes d’ascendance africaine, asiatique ou autochtone fuyant l’Ukraine – et d’autres guerres et conflits dans le monde – n’ont pas reçu le même traitement que les réfugiés ukrainiens. Ils ont rapporté des incidents troublants de discrimination, de violence et de racisme. Ces actes de discrimination sont inacceptables. Nous usons de nos nombreux canaux et ressources pour nous assurer que toutes les personnes soient protégées de manière égale.
Nous pouvons – et devons – saluer la solidarité, tout en condamnant résolument les actes de racisme et de discrimination.
Nous devons rejeter les actes qui ébranlent nos valeurs fondamentales ou qui privent les autres de leurs droits humains fondamentaux, tout en continuant à reconnaître nos propres préjugés et à en tirer les leçons.
La lutte contre le racisme consiste à identifier et à combattre activement le racisme et la discrimination raciale. Aujourd’hui – et au quotidien – j’appelle chacun d’entre nous à dénoncer les politiques, les pratiques et les comportements discriminatoires.
Nous pouvons tous progresser dans notre combat individuel et collectif contre le racisme.
Nous ne réussirons pas à chaque fois, mais nous resterons déterminés à mieux faire, à rester humbles et à faire preuve d’ouverture.
J’espère que vous vous joindrez à nous, car ce travail important requiert notre participation à tous.
Publie par le HCR, le 21 mars 2022.