Un homme se tient dans un champ, les doigts entrelacés devant lui, tenant un bâton de bois dans ses bras. Il porte un grand chapeau de soleil, un haut bleu sans manches et une chemise à manches longues.

Awad Usman, un réfugié soudanais, dans son champ de sésame à Maban, au Soudan du Sud.© HCR/Tiksa Negeri

Un projet du HCR prévoit la construction de digues pour protéger les terres agricoles inondables à Maban et aide les réfugiés et les agriculteurs locaux à adapter leurs méthodes de travail

Par Amy Christian à Maban, Soudan du Sud


Écrite sur un petit morceau de papier, pliée à l’intérieur d’un minuscule boîtier métallique et attachée à une lanière de cuir usée, la prière d’Awad Usman, 37 ans, est attachée à son bras tous les matins lorsqu’il se rend sur les terres où il cultive du sésame et du sorgho.


Il touche le boîtier métallique qui pend à son bras. « Chaque année, nous la renouvelons [la prière]. Si on constate que les choses ne vont pas bien, on la change à nouveau. J’ai mis celle-ci au début de la saison des pluies parce qu’il me semblait que la prière précédente ne fonctionnait pas. »

Awad est un réfugié du Soudan. Il est arrivé à Maban, au Soudan du Sud, il y a plus de dix ans, lors de la guerre qui a séparé les deux pays. Il vit toujours dans le même camp de réfugiés à Maban, où il a progressivement construit une habitation pour sa famille et où il gagne sa vie en tant qu’agriculteur.

Quatre rivières traversent le comté de Maban, situé dans le nord de l’État du Haut-Nil, au Soudan du Sud. Pendant la saison des pluies, de mai à octobre, ces rivières mettent en péril la vie et les moyens de subsistance des habitants de Maban.

« La dernière crue a inondé tout le champ et détruit tout le sésame », se souvient Awad. « Lorsque les eaux sont montées, elles ont atteint le sommet du pont que nous empruntons pour aller de nos habitations aux terres agricoles, si bien que nous n’avons pas pu vérifier l’état de nos récoltes pendant cinq jours. Quand nous y sommes parvenus, nous avons vu que tout avait été détruit. »

Un homme est à genoux devant la caméra, dans un champ. Il tend son bras droit devant lui pour placer un outil en bois dans la terre. Il semble qu'il le fasse de manière expressive, tout en parlant ou en sifflant.

Awad Usman désherbe son champ de sésame. Les inondations de 2019 ont détruit toute sa récolte. © HCR/Tiksa Negeri

La multiplication des phénomènes météorologiques extrêmes, tels que les inondations et les sécheresses, accentue les difficultés auxquelles sont confrontées les personnes qui ont été forcées de fuir les conflits et la violence. Lors du sommet de la COP29 qui se tient en Azerbaïdjan cette semaine et la semaine prochaine, le HCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, et des réfugiés activistes en matière de climat appellent à un financement et à un soutien accrus pour permettre aux populations concernées de s’adapter aux conséquences de la crise climatique.

Le Soudan du Sud est l’un des cinq pays les plus exposés aux effets du changement climatique, et les réfugiés et autres personnes contraintes de fuir sont parmi les plus durement affectés. Selon le programme des Nations unies pour l’environnement, les précipitations y ont diminué de 10 à 20 % depuis le milieu des années 1970. À l’inverse, le risque d’inondations a augmenté d’année en année. Les récentes inondations au Soudan du Sud ont touché plus de 1,4 million de personnes (lien en anglais) et en ont déplacé 271 000, selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (OCHA).

Les bonnes années, Awad récolte suffisamment de sésame et de sorgho pour en vendre la moitié. Mais lorsque la production est faible, il en reste à peine assez pour nourrir sa famille. « Après les dégâts causés par les dernières inondations [en 2021], j’ai dû aller au marché et travailler par-ci par-là pour couvrir les besoins de ma famille », explique-t-il.

L’insécurité alimentaire est un problème majeur qui touche à la fois les réfugiés et les membres de la communauté d’accueil, explique Alex Noel Kilong, spécialiste des moyens de subsistance et de l’inclusion économique au HCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, à Maban. Il supervise des projets visant à atténuer les effets du changement climatique sur les moyens de subsistance et la sécurité alimentaire d’environ 300 000 personnes dans la région, y compris les réfugiés et les communautés d’accueil.

« C’est un pays qui souffre des conflits depuis longtemps. Les inondations viennent donc s’ajouter aux difficultés auxquelles les communautés sont déjà exposées », ajoute-t-il. « Les moyens de subsistance sont impactés par les inondations, les animaux sont emportés, les réseaux routiers sont endommagés, les communautés n’ont plus accès aux services médicaux. »

Le HCR et ses partenaires s’efforcent de soutenir les agriculteurs réfugiés comme Award qui n’ont que peu ou pas de ressources pour s’adapter au changement climatique. Ils ont négocié pour obtenir les terres qu’Awad et d’autres réfugiés cultivent et leur ont fourni de l’argent pour acheter des semences et du matériel agricole. Ils les ont également formés à de nouvelles pratiques agricoles, telles que la diversification des cultures, afin que les terres puissent être cultivées tout au long de l’année et qu’ils soient moins durement touchés si l’une des récoltes est compromise par des inondations. Les agriculteurs ont également été initiés à de nouvelles productions, comme le sésame, qui peut être vendu à un prix plus élevé que des cultures comme le sorgho.

Un homme portant un gilet bleu ouvert tend le bras vers un objet situé à l'extérieur de l'image, sur le côté gauche. La personne semble plus basse que le début d'un humble pont en bois au-dessus d'elle. Il se tient à côté d'une eau boueuse et tient un grand bâton dans ses mains.

Alex Noel Kilong, spécialiste des moyens de subsistance et de l’inclusion économique au bureau du HCR à Maban, aide les réfugiés à construire un pont en prévision des inondations attendues dans la région. © HCR/Tiksa Negeri

Alex pilote également un projet qui a permis de construire 2 kilomètres de digues à travers le comté pour protéger les terres agricoles, les routes d’accès, une piste d’atterrissage et les habitations d’Awad et de ses voisins contre les inondations. C’est un travail difficile, qui prend du temps, mais qui porte ses fruits.

Le projet comprend la construction de ponts afin qu’Awad et les membres de sa communauté ne soient pas coupés de leurs terres agricoles lorsque les rivières sont en crue.

Ces interventions sont essentielles pour aider les agriculteurs réfugiés comme Awad à rester autosuffisants et se construire un avenir meilleur.

Cinq personnes sourient vers la droite de l'écran en tenant des outils agricoles.

Awad et sa famille se rendent dans leurs champs. Ils ont fui le Soudan il y a 10 ans et dépendent de l’agriculture pour vivre. © HCR/Tiksa Negeri

Cette saison, Awad a travaillé dur pour faire en sorte que son sésame parvienne à maturité et qu’il soit récolté avant l’arrivée des inondations, une pratique qu’il a apprise du HCR et de ses partenaires. Les digues qui entourent désormais ses terres agricoles ont permis de mieux protéger ses cultures et, bien qu’il y ait eu quelques inondations, il a tout de même pu obtenir un bon rendement.

Lui et sa famille passent leurs journées dans les champs, à semer, à désherber et à récolter, selon l’époque de l’année. Ils chantent et plaisantent entre eux tout en travaillant sous un soleil écrasant.

« Je chante une chanson qui rend hommage à mes récoltes, cela me rend heureux », sourit Awad.

Publie par le HCR, le 15 novembre 2024.

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