Un programme de formation professionnelle, financé par l’Agence allemande de développement, enseigne aux réfugiés et à leurs hôtes des compétences allant de la cuisine et du travail du bois à la mécanique.
Toute la matinée, Hanan Seif Hassan, une réfugiée yéménite âgée de 32 ans, et ses amies ont coupé des oignons, pelé des carottes, fait bouillir des lentilles, cuisiné du riz et préparé des samosas, pour les vendre en tant que collations très appréciées.
Elles sont devenues amies lorsqu’elles suivaient un cours de formation professionnelle au Nefas Silk Polytechnic College d’Addis-Abeba, le premier du genre en Ethiopie où des réfugiés et des Ethiopiens peuvent étudier ensemble des sujets allant de la cuisine et du travail du bois à la mécanique.
Au début, Hanan ne savait pas à quoi s’attendre. Elle craignait de ne pas s’intégrer en tant qu’étudiante adulte et réfugiée. Ses inquiétudes se sont évanouies lorsqu’elle a appris à connaître ses camarades de classe, y compris sa meilleure amie éthiopienne, Yanchinew Gebeyehu, 26 ans.
« Nous sommes très proches et nous nous entraidons dans nos études. Chaque fois que quelque chose n’est pas clair, quelqu’un d’autre dans le groupe prend la peine de nous l’expliquer », indique Hanan.
Passer du temps avec ses camarades éthiopiennes a également aidé Hanan à mieux comprendre et apprécier son nouvel environnement.
« Ici nous apprenons la langue, la culture et le mode de vie de nos camarades de classe. Cela a aussi changé notre façon de considérer la vie », ajoute-t-elle.
Yanchinew chérit également les amitiés nouées lors de sa formation.
« Nous n’avons pas de traitement spécifique pour les réfugiés… nous les considérons comme des citoyens. »
« Hanan est une personne de valeur. Elle est humble. Elle me dit ce qu’elle ressent et nous sommes très proches, comme des sœurs. J’ai beaucoup appris de sa part », dit-elle.
L’initiative du Nefas Silk College s’inscrit dans le cadre du programme Qualifications and Employment Perspectives for Refugees and Host Communities, commandé par le ministère fédéral allemand de la coopération économique et du développement et mis en œuvre par GIZ, l’Agence allemande de développement. Il améliore les perspectives d’emploi en Éthiopie, tant pour les réfugiés que pour les Éthiopiens.
Melese Yigzaw, doyen du collège, explique qu’il est vital que les réfugiés et les Ethiopiens aient les mêmes chances de se préparer au marché du travail.
« L’objectif de cette formation intégrée est l’emploi. Nous n’avons pas de traitement spécifique pour les réfugiés…. nous les considérons comme des citoyens », dit-il.
Le doyen ajoute qu’il est essentiel de permettre aux réfugiés de travailler afin qu’ils puissent prospérer pendant leur exil et contribuer à l’économie de leur propre pays lorsqu’ils pourront rentrer chez eux en toute sécurité.
« Si quelqu’un est compétent et qu’il peut changer la boite de vitesse d’un véhicule ou cuisiner, il peut générer des revenus. Si vous les formez, ils peuvent créer des emplois partout où ils vont, même lorsqu’ils rentrent chez eux », ajoute-t-il.
L’Ethiopie abrite l’une des populations réfugiées les plus importantes d’Afrique. La plupart de ces réfugiés proviennent du Soudan du Sud, de Somalie, d’Erythrée, du Soudan et du Yémen.
En janvier 2019, le pays a adopté une nouvelle loi historique sur les réfugiés. Considérée comme l’une des politiques les plus progressistes au monde en faveur des réfugiés, la loi relative aux réfugiés leur donne le droit d’obtenir des permis de travail, d’accéder à l’enseignement primaire, d’enregistrer légalement les naissances et les mariages ainsi que d’accéder à des services financiers, comme les banques.
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« Le Nefas Silk Vocational College est un exemple de la manière dont l’inclusion des réfugiés dans le système de formation professionnelle en Ethiopie peut fonctionner. La nouvelle loi a ouvert la voie à la réalisation de ce projet pilote », déclare Tobias Erbert, coordinateur du programme GIZ, Qualifications and Employment Perspectives for Refugees and Host Communities Programme.
L’initiative a également permis aux enseignants de recevoir une formation complémentaire et aux étudiants de bénéficier de la formation offerte par les entreprises des secteurs de l’hôtellerie et des transports. GIZ prévoit également d’apporter son appui au collège dans la mise en place d’un centre d’entrepreneuriat pour aider les jeunes entreprises en démarrage.
Dans le cadre de sa stratégie, la GIZ a organisé un concours pour encourager des groupes de réfugiés et d’Éthiopiens à présenter des idées de création d’entreprise à un jury composé d’employés du collège et de membres du monde des affaires. Grâce à leur proposition d’une entreprise de samosas, Hanan et ses amies étaient l’un des deux groupes gagnants qui vont maintenant bénéficier du mentorat d’un coach en affaires pour élaborer leur plan d’entreprise.
« Notre expérience du soutien à l’entreprenariat en Éthiopie démontre qu’il ne suffit pas d’apprendre aux gens à rédiger un plan d’affaires. Ce qui est crucial, c’est que les entrepreneurs bénéficient d’un soutien et de conseils en continu », ajoute Tobias Erbert.
Ces partenariats stratégiques entre le HCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, le secteur privé et les partenaires de développement illustrent comment une approche plus intelligente et plus globale des situations de réfugiés peut aider à alléger le fardeau de l’accueil des réfugiés pour les communautés hôtes, à accroître l’autonomie des réfugiés et à accroître les possibilités de réinstallation.
« Ici, nous sommes libres, nous pouvons bouger, nous pouvons penser indépendamment. Je me sens libre comme l’air à Addis. »
L’éducation et l’accès à un travail sûr et décent sont des sujets à l’ordre du jour du Forum mondial sur les réfugiés, une réunion de haut niveau qui se tiendra à Genève plus tard cette année. Les États, le secteur privé et d’autres acteurs annonceront des contributions à fort impact qui donneront aux réfugiés la possibilité d’utiliser et de développer davantage leurs compétences ainsi que de contribuer à la croissance économique de leurs communautés hôtes.
L’Éthiopie a offert à Hanan des opportunités dont elle n’aurait jamais osé rêver dans son pays d’origine.
« Au Yémen, nous ne pouvons pas aller à l’école comme ça ou sortir seules. Ici, nous sommes libres, nous pouvons bouger, nous pouvons penser indépendamment. Je me sens libre comme l’air à Addis-Abeba », déclare-t-elle.
Publie par le HCR, le 29 octobre 2019